Publication 7 février 2018

Lutter contre les fake news au niveau européen

Le 3 janvier dernier, le Président Emmanuel Macron a annoncé lors de ses vœux à la presse la préparation d’un texte de loi visant à limiter la diffusion des fake news sur Internet. Alors que la version définitive du texte n’est pas encore disponible, cette annonce législative fait déjà l’objet de vives critiques (périmètre, atteintes aux libertés fondamentales, etc.) et soulève de sérieuses questions (pertinence et faisabilité d’une telle loi). La France n’est cependant pas le seul pays européen à se préoccuper de cette question. En effet, l’Union européenne et d’autres pays européens se sont saisis du problème. Quelle est leur stratégie en la matière ?

L’Allemagne, l’exemple de la régulation par la sanction juridique.

L’Allemagne est pour l’instant le seul pays européen à proposer une telle législation sur ce sujet. Adoptée juste avant les élections fédérales allemandes de septembre 2017, cette loi, baptisée NetzDG, est entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Elle impose aux plateformes du numérique la suppression des contenus illégaux signalés en moins de 24 heures, sous peine d’une sanction pouvant aller jusqu’à 50 millions d’euros. Cette législation ne concerne cependant pas directement les Fake News, mais les propos haineux illégaux, parmi lesquels peuvent donc être diffusés des Fake News (En savoir plus). Cependant, cette loi est aujourd’hui critiquée en raison des dérives démocratiques qu’elle pose, notamment les risques de censure excessive. En effet, rappelons que les modérateurs ne sont pas des avocats en mesure d’identifier et qualifier aisément une potentielle infraction à une loi (En savoir plus).

L’Italie et le Royaume-Uni dans le sillage de l’Allemagne… avant de faire finalement demi-tour.

  • Au Royaume-Uni, un rapport parlementaire daté d’avril 2017 préconisait un système de sanction échelonné si les réseaux sociaux ne retiraient pas un contenu illégal signalé dans le délai imparti (voir le rapport). Alors que ce rapport parlementaire semble demeurer lettre morte, le gouvernement de Theresa May a annoncé le 23 janvier 2018 la création d’ « une agence pour lutter contre les fausses informations » provenant de certaines puissances étrangères, en particulier la Russie (En savoir plus).
  • Dans la même lignée en Italie, le parti Démocrate de Matteo Renzi proposait en février 2017 que le pays adopte une loi anti Fake News largement inspirée de l’exemple allemand (En savoir plus). Toutefois là encore, devant l’incapacité du Parlement à adopter une telle loi et à deux mois des élections législatives, le Ministre de l’Intérieur italien a annoncé en parallèle le lancement d’un outil de vérification des informations. Outil dans lequel les citoyens peuvent signaler des fausses informations, et la police italienne les vérifier/démentir/supprimer, voire enjoindre des sanctions pour une éventuelle diffamation (En savoir plus). Les journalistes italiens ont  néanmoins vivement condamné cette initiative qu’ils qualifient de « Ministère de la vérité » (En savoir plus).

Plus prudente, l’Union européenne préfère miser sur l’auto-régulation. 

La Commission a lancé le 13 novembre 2017 une consultation publique sur les fausses nouvelles et a créé un groupe d’experts de haut niveau en vue d’élaborer la stratégie de l’Union européenne en la matière. Cette stratégie ne devrait en revanche pas se matérialiser via une loi, mais plutôt une « communication » , proposant une collaboration accrue avec les réseaux sociaux, qui sera présentée au printemps 2018 (En savoir plus). Cette démarche n’est pas sans rappeler celle entreprise par la Commission afin de limiter la diffusion des messages haineux en ligne, symbolisée par la signature d’un code de bonne conduite en mai 2016 (Voir le code). Enfin, rappelons que l’Union européenne s’était dotée début 2017 d’un outil, Les Décodeurs de l’Europe, visant à déconstruire les idées reçues qui alimentent rumeurs et fantasmes autour du vieux continent.


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