Publication 26 février 2018

La valeur des données agricoles

Auteurs

  • Jennyfer Chrétien Délégué générale, Renaissance Numérique

  • Henri Isaac Président, Renaissance Numérique

  • Marine Pouyat Consultante, Agence u, Avocate de formation

Alors que les États Généraux de l'Alimentation se sont conclus en décembre 2017 par de nombreux engagements de transformation dans le secteur agricole et alimentaire, Renaissance Numérique appelle à s'interroger sur la reconfiguration en cours. Dans cette note, le think tank formule des préconisations pour garantir les équilibres au sein de la chaîne de valeur des données agricoles.

Un enjeu crucial pour l’avenir des filières agricoles

Les données pourraient être à l’origine d’une reconfiguration des équilibres au sein des filières agricoles. Afin d’éviter un déséquilibre autour de la chaîne de traitement des données, il est impératif de s’interroger sur cette reconfiguration. Plusieurs plans de transformation des filières, issus des États généraux de l’alimentation, traduisent une prise de conscience en la matière, comme la nécessité de mieux informer le consommateur. Cependant, ni les filières agricoles, ni les pouvoirs publics, ne semblent avoir une vision stratégique globale concernant les données dans la chaîne de valeur agro-alimentaire.

Une richesse inhérente au secteur

Le secteur agricole, et la chaîne alimentaire dans son ensemble, concentrent des données nombreuses et variées : il existe peu d’industries où l’on produit autant de données, et surtout depuis aussi longtemps.

Ces données sont désormais produites grâce aux technologies numériques intégrées dans les machines agricoles (capteurs, robots, drones, etc.).

Dans le même temps, les chaînes de distribution se modifient avec la croissance du e-commerce, des circuits-courts, étendant les chaînes logistiques alimentaires jusqu’au client final.

Si le partage des données est essentiel, leur valeur dépendra de leur agrégation et de leur mise en relation avec d’autres données : elles doivent être interopérables. Elles doivent être de qualité suffisante, et accessibles à tous les acteurs de la chaîne.

Un manque de limpidité en matière juridique

La circulation des données dans la chaîne agro-alimentaire doit se fonder sur des bases juridiques accessibles et partagées par tous. Ainsi, l’équilibre des forces au sein de la chaîne de valeur ne pourra se négocier qu’à la faveur d’un effort pédagogique.

Il existe des bases juridiques d’encadrement des données, qui doivent servir à régir leur collecte, traitement et partage : la loi, le contrat, le contentieux.

Les relations contractuelles ont un rôle clé à jouer, à condition de ne

pas servir de base au maintien de relations asymétriques. La blockchain peut offrir un cadre alternatif, se passant d’intermédiaires pour sécuriser juridiquement et économiquement les transactions (via des smart contracts).

Cet enjeu de clarification juridique se manifeste alors que les règles générales concernant la donnée – notamment les données personnelles – évoluent au niveau européen dans le cadre de la mise en application du Règlement général sur la protection des données et des discussions en cours relatives au Règlement E-privacy. À cet égard, le statut juridique des données issues des machines agricoles ou des nouveaux dispositifs numériques utilisés en agriculture (drones, raw machine-generated data) reste un objet de débat au niveau européen.

Un mouvement de « plateformisation » à ses prémices

À l’image du reste de l’économie, le secteur agricole s’est récemment engagé dans un mouvement de « plateformisation », avec la mise en réseau de ses activités, et le partage accéléré de ses données. Cependant les enjeux économiques et juridiques liés aux données sont loin d’être pris en compte. Par exemple, les premiers projets de plateformes ne semblent pas avoir bien intégré les données consommateur et les logiques de réutilisation des données.

Seul un travail de qualification des données permettra leur maîtrise, et garantira l’accessibilité des informations. Des intermédiaires doivent se saisir de cet enjeu. Cette question relève également de choix politiques. Au-delà de l’accès à l’information, se pose la question de sa promotion active par l’engagement de ses acteurs et des obligations réglementaires.

RECOMMANDATIONS

Recommandation n°1

Développer des dispositifs incitatifs d’aide financière ou technique pour encourager les acteurs à ouvrir leurs données, et permettre ainsi d’enrichir la chaîne de valeur agro-alimentaire.

Recommandation n°2

Donner le pouvoir au consommateur d’accéder à l’information sur l’histoire du produit.

Recommandation n°3

Donner à l’agriculteur la maîtrise de ses données.

Groupe de travail :

Groupe de travail

  • Paul Bounaud

    GS1 France

  • Emmanuel Lempert

    SAP


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