Publication 14 février 2020

Cybersécurité : Accompagner un système de santé en pleine mutation

En 2019, plusieurs cyberattaques à l’encontre d’établissements de santé français ont défrayé la chronique. Parmi les exemples figurent les « ransomwares » qui ont visé le CHU de Rouen et le groupe Ramsay Générale de Santé, ou encore l’attaque par hameçonnage qui a ciblé le CHU de Montpellier. Au-delà des cyberattaques, il existe également un « risque quotidien » auquel doivent faire face les acteurs du parcours de soins en matière de gestion des données de santé. Alors que le gouvernement a engagé un vaste plan de transformation numérique du système de santé au travers de la stratégie nationale “Ma Santé 2022”, Renaissance Numérique s’interroge sur les capacités de cyber-résilience de ce secteur. Cette note est issue de la table ronde « Cybersécurité : vers un système de santé résilient ?  », organisée le 25 octobre dernier par le think tank, en partenariat avec Kaspersky France. Elle explore tour à tour les spécificités du secteur de la santé en matière de cybersécurité, ainsi que des facteurs clés pour améliorer la cyber-résilience des acteurs du parcours de soins.

Le secteur de l’offre de soins figure sans conteste parmi les domaines d’activité les plus exposés – et les plus à risque – aux attaques informatiques. Ces dernières années, des cyberattaques d’une ampleur sans précédent ont touché des établissements de santé, avec, parfois, des répercussions sur les activités de soins. Parmi les récents exemples figurent les « ransomwares » qui ont visé le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rouen en novembre 2019 (arrêt total de l’ensemble du système informatique entrainant des délais très longs de prise en charge, 300 000 euros de rançon demandés), ainsi que le groupe Ramsay Générale de Santé à la fin de l’été 2019 (120 établissements de santé en France, blocage de la messagerie et des applications métiers utilisées par le personnel). Trois mois plus tôt, c’était le CHU de Montpellier qui était la cible d’une attaque par hameçonnage (649 ordinateurs infectés, plus de 800 consultations fortement perturbées, impossibilité de traiter les urgences du SAMU pendant une demi-journée).

La diffusion rapide des outils et des usages numériques au sein du système de santé, couplée aux logiques de rapprochement inter-acteurs, accroissent de facto la surface d’exposition aux cyber risques. Selon Guillaume Poupard, Directeur général de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), leur nombre serait passé d’une tous les mois ou tous les deux mois, à une par semaine en un an seulement. Les motivations des attaquants peuvent être de différentes natures selon la méthode utilisée, mais l’un des principaux modus operandi semble pour l’instant concerner le vol de dossiers médicaux de patients pour les restituer moyennant une rançon.

Au-delà des cyberattaques, il existe également un « risque quotidien  » auquel doivent faire face les professionnels de santé. Le média ProPublica rapportait en septembre 2019 que des données de santé de millions d’Américains se trouvaient sur la toile, en libre accès, en raison de serveurs non protégés. Ce risque est particulièrement sérieux compte tenu des spécificités du système de santé, marqué par une grande interconnexion, des architectures informatiques parfois très hétérogènes – nombre d’établissements sont encore peu matures sur les enjeux de cybersécurité – ainsi que le caractère hautement sensible des données de santé. Depuis quelques années, le secteur de la santé est même passé en tête des domaines où les risques financiers relatifs aux failles de sécurité informatiques sont les plus importants, devant le secteur bancaire. En effet, selon une étude réalisée en 2017 par le cabinet américain Ponemon Institute, les coûts associés à une violation de données, rapportés à un individu, y sont près de deux fois et demi supérieurs (380 dollars) que la moyenne de tous les autres secteurs confondus (141 dollars).

Renaissance Numérique a décidé de s’intéresser aux enjeux de cybersécurité dans le système de santé et d’interroger les capacités de résilience de ce secteur en profonde transformation numérique. Cette réflexion fait aussi écho au déploiement de la stratégie nationale « Ma Santé 2022 » et à l’adoption de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. Le volet numérique de ce texte (cf. Titre III « Développer l’ambition numérique en santé ») prévoit notamment la création d’une plateforme des données de santé, l’ouverture automatique d’un Dossier médical personnel (DMP) pour tous les bénéficiaires de l’assurance maladie, et le déploiement de la télémédecine. Le texte inclut également plusieurs dispositions relatives à la collecte, au traitement, au partage et à la sécurisation des données des patients, qui seront complétées par plusieurs décrets du Conseil d’État. Cette phase de transition est une opportunité pour l’ensemble du système de santé de monter en maturité sur les enjeux de cybersécurité. Cette note explore tour à tour les spécificités du secteur de la santé en matière de cybersécurité, ainsi que les facteurs clés pour améliorer la cyber-résilience des acteurs du parcours de soins.

RECOMMENDATIONS

Recommandation n°1

Sensibiliser tous les acteurs du parcours de soins aux enjeux de cybersécurité

Recommandation n°2

Sécuriser l’ensemble de la chaîne de santé en consolidant les relations contractuelles entre établissements de soins et prestataires

Recommandation n°3

Miser sur des établissements de soins « chefs de file » pour diffuser les bonnes pratiques en matière d’hygiène numérique au sein des territoires

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